Rénovons le sport !
Thierry Chiron et Emilie Sachot

Rénovons le sport !

Alors que le comité national pour renforcer l’éthique et la vie démocratique dans le sport vient de rendre son rapport au Ministère le 7 décembre dernier pour déboucher l’an prochain sur une initiative législative selon Amélie Oudéa-Castera, l’occasion est à saisir pour que le texte qui sera destiné à rénover le sport français n’oublie pas le sujet du contentieux sportif.

Le constat est fait que le dispositif actuel de résolution des litiges en matière sportive, en tout cas ceux relevant de la délégation de service public confiée aux fédérations, réduit considérablement la possibilité d’accéder au juge.

En effet, forte de son succès, la conférence des conciliateurs[1] du CNOSF est confrontée à une volumineuse affluence de demandes ce qui complique de plus en plus la possibilité de fournir des réponses dans des délais suffisamment courts respectant les contraintes et exigences du monde sportif, ceci quand le délai d’un mois imposé par les textes pour rendre un avis n’est pas dépassé. Et encore faut-il que la conciliation conduise effectivement à une résolution amiable du litige, ce qui peut être remis en question lorsque l'une des parties décide de ne pas participer physiquement à l’audience ou lorsque l'audience de conciliation prend une tournure plus proche de l’arbitrage ou de l’instance judiciaire.

De plus, la conciliation obligatoire arrive la plupart du temps en tout bout de course, après le nécessaire épuisement des voies de recours interne, impliquant ainsi une bataille en amont devant les commissions fédérales de première instance et d’appel laquelle peut s’étendre sur plusieurs mois.

Alors que le Conseil d’Etat décide désormais dans les litiges relatifs à l’intégration d’une équipe à un championnat que le recours n’a plus d’objet dès que le championnat a débuté[2] , l’accès effectif au juge devient quasiment impossible tant les étapes préalables prennent du temps, lequel lors des intersaisons notamment est particulièrement court et donc incompatible avec la conduite du contentieux.

Ne faudrait-il donc pas réfléchir à alléger le chemin procédural des clubs ou des sportifs qui contestent les décisions de leur fédération de leur ligue ou encore de leurs organes de contrôle de gestion ?

La médiation pourrait être une solution au problème.

Alors que la politique de l’amiable se développe à grand pas sous la volonté politique du Garde des Sceaux, ne serait-il pas opportun d’ajuster le dispositif de résolution des litiges sportifs pour lui faire profiter des avantages et des bienfaits de la médiation ?

Pourquoi ne pas envisager d’intégrer la possibilité d’une médiation, en tant qu’alternative aux interminables étapes habituelles (1ère instance fédérale, appel fédéral et conciliation) lesquelles entravent l'accès au juge. Cette possibilité permettrait ainsi de simplifier le parcours du combattant des clubs et des sportifs avant de pouvoir saisir, le cas échéant, le juge.

Cette mesure pourrait être mise en place au sein du CNOSF qui regrouperait alors à coté de la conférence des conciliateurs un collectif de médiateurs. Dans une telle hypothèse, la médiation du CNOSF devrait être encadrée dans sa durée pour correspondre aux exigences du temps sportif  et au bon déroulement des championnats. En cas d’échec, elle pourrait donner accès au juge sans autre formalité, dans des temps plus conformes aux exigences de la compétition.

La médiation resterait un dispositif volontaire, alternatif, venant en complément de ceux qui existent aujourd’hui. Elle présenterait l’avantage de se dérouler en présence d’un tiers, indépendant et impartial, les parties conservant la responsabilité d’élaborer la solution à leur conflit.

L’initiative législative annoncée par Amélie Oudéa-Castera pour 2024 pourrait donc être une opportunité de contribuer à rénover le contentieux sportif en facilitant le recours à la médiation.

 

[1] Dont le nombre est aujourd’hui de 21.

[2] Conseil d’Etat, 11 mai 2023, req. n°468650.